"Seul contre tous. Mercredi 6 décembre, Donald Trump a reconnu Jérusalem comme capitale d'Israël, marquant une rupture spectaculaire avec ses prédécesseurs et suscitant une vague de réprobation unanime -ou presque- au Proche-Orient et au-delà, sur fond d'inquiétudes d'une "nouvelle intifada."
Avec cette décision historique, le président américain tient l'une de ses promesses emblématiques de campagne. Mais il s'isole encore un peu plus sur la scène internationale et vient de "détruire" les timides espoirs de reprise des discussions de paix entre Israéliens et Palestiniens. "J'ai le sentiment que la décision de Donald Trump est une décision de politique intérieure. Il n'en a rien à faire du conflit israëlo-palestinien", résume la spécialiste du Moyen-Orient Agnès Levallois au
HuffPost.
Une décision historique mais attendueUn tournant majeur dans la politique étrangère américaine, mais qui ne représente pas une surprise pour autant. Selon Donald Trump, reconnaître Jérusalem comme la capitale d'Israël aurait dû être fait "il y a longtemps." Il faut dire que ses trois prédécesseurs en ont eu l'occasion tous les six mois, depuis 1995 et l'approbation du Jerusalem Embassy Act par le Congrès. Une loi appelant à reconnaître Jérusalem comme capitale de l'état hébreu, mais permettant au président américain d'en repousser l'application tous les six mois.
"On peut dire que c'est la suite logique. Mais ce n'est pas parce que le Congrès décide cela, que le président américain est obligé de le faire", explique Agnès Levallois. La spécialiste du Moyen-Orient pointe une décision qui, en plus de bafouer les résolutions de l'ONU, entérine l'annexion illégale de Jérusalem-Est par Israël en 1967 lors de la guerre des Six-Jours." "La décision de Donald Trump conforte la politique de colonisation de la ville. Elle est conforme à ce qui se passe aujourd'hui", estime pour sa part l'historienne Stéphanie Latte au
HuffPost.
C'est en effet sur cette ville "réunifiée" que Donald Trump s'appuie pour "reconnaître Jérusalem comme capitale d'Israël". "Ce n'est rien de moins qu'une reconnaissance de la réalité" a-t-il lancé, avant d'expliquer: "Il y a 70 ans les Etats-Unis, sous le président Truman, ont reconnu l'Etat d'Israël. Depuis, Israël a établi sa capitale dans la ville de Jérusalem, la capitale choisie par le peuple juif dans les temps anciens. De nos jours, Jérusalem est le siège du gouvernement israélien moderne. C'est le siège du Parlement israélien, la Knesset, et de la Cour suprême israélienne."
Bien plus qu'une décision symboliqueSi la décision prise par Donald Trump n'a pas de "valeur juridique", comme l'explique Stéphanie Latte, elle ne doit pas être résumée à un acte uniquement symbolique. Comme l'ont montré les nombreuses condamnations internationales, le président américain a "franchi une ligne rouge majeure du côté des Palestiniens".
Depuis des décennies, la communauté internationale se garde de reconnaître Jérusalem comme capitale. Pour elle, la question du "statut final" de la ville, l'une des plus épineuses en vue d'un règlement de ce vieux conflit entre Israéliens et Palestiniens, doit être négociée. Or, les dirigeants palestiniens estiment que la décision de Donald Trump préjuge du résultat de négociations sur ce "statut final". De quoi provoquer une colère sans précédent, qui commence à se manifester dans les rues.
Jeudi 7 décembre, plusieurs dizaines de Palestiniens ont affronté les soldats israéliens et brûlé le portrait de Donald Trump. Plus d'une vingtaine d'entre eux ont été blessés par des balles en caoutchouc ou des balles réelles dans les heurts rapportés à travers toute la Cisjordanie et dans la bande de Gaza. Le mouvement palestinien Hamas a appelé à une "nouvelle intifada" et l'armée israélienne a annoncé le déploiement de renforts en Cisjordanie occupée, en prévision d'une escalade, laissant entrevoir une situation potentiellement explosive.
La fin du processus de paix"Les Palestiniens sont épuisés de voir que rien ne se passe depuis des années", explique Agnès Levallois qui ne croit pas d'avantage à une nouvelle intifada qu'à l'aboutissement d'un processus de paix. Pour sa part, le président palestinien Mahmoud Abbas estime que les Etats-Unis sont à présent discrédités pour continuer à jouer le rôle de médiateur de la paix qui a été le leur pendant des décennies.
Une réponse à Donald Trump qui, lors de son discours historique, a réaffirmé sa volonté de relancer ce processus de paix moribond, et même à parvenir à "l'accord ultime". Un cas de figure très improbable pour Agnès Levallois qui estime que la décision de Donald Trump revient à traiter les Palestiniens comme "des moins que rien": "Il n'y a plus aucun dialogue. D'un côté, Israël poursuit la colonisation, de l'autre les Palestiniens donnent tout et on les roule dans la farine." Même son de cloche du côté de Stéphanie Latte qui estime que "les Palestiniens ne pourront pas faire plus de concessions qu'ils n'en ont déjà fait."
"Tout ceci est la confirmation qu'il s'agit, depuis le début, d'une illusion", tranche Barbara Slavin, du groupe de réflexion Atlantic Council. Pour elle, l'entreprise diplomatique de Donald Trump et Jared Kushner "est une façade pour que l'Arabie saoudite puisse justifier son rapprochement avec Israël contre l'Iran". C'est en effet pour l'instant tout ce qui a filtré de la stratégie américaine: favoriser une alliance israélo-saoudienne contre l'ennemi commun, Téhéran.
Reste à savoir si la communauté internationale prendra le conflit israëlo-palestinien à bras le corps pour mettre les États-Unis sur la touche et relancer un processus de paix qui apparaît aujourd'hui plus qu'incertain. Premier élément de réponse vendredi 8 décembre, lors d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité de l'ONU."
Source: http://www.huffingtonpost.fr/2017/12/07/jerusalem-comment-donald-trump-a-pietine-le-tres-fragile-processus-de-paix-israelo-palestinien_a_23300425/?utm_hp_ref=fr-international
Visiblement, ça lui suffisait pas de foutre le m¨rd%r dans son propre pays...