Constantin promulgue l'édit de Milan
Le 13 juin 313, l'empereur Constantin, fort de sa victoire du pont Milvius sur son rival Maxence, promulgue l'édit de tolérance de Milan par lequel il légalise le christianisme. C'est un retournement inattendu après la « Grande Persécution » inaugurée dix ans plus tôt par les tétrarques Dioclétien et Galère.
La religion devient une affaire individuelleL'édit de Milan n'est pas le premier du genre. D'autres l'ont précédé, y compris celle de Galère, deux ans plus tôt. Mais il se singularise par le fait qu'il introduit un élément nouveau dans la société romaine, à savoir la liberté religieuse.
Jusque-là, la religion était une affaire de communauté et d'identité ethnique. On suivait la religion de ses ancêtres et de son groupe. L'édit de Milan reconnaît à chaque individu la faculté de suivre la religion de son choix. C'est un changement radical de paradigme que relève Marie-Françoise Baslez, professeur d'histoire des religions à la Sorbonne (voir à ce propos Le Monde de la Bible, Hors-série printemps 2013, consacré à Constantin le Grand, à son édit de tolérance et à son entourage (Hélène, Eusèbe de Césarée...).
L'édit de Milan lève par ailleurs les interdits qui pèsent sur la communauté des chrétiens. Les Églises locales se voient restituer les biens qui leur ont été confisqués, même lorsqu'ils ont été vendus à des particuliers.
Christianisation des moeursDès lors, tout change assez vite. Le christianisme rassemble à cette date un dixième à peine de la population de l'empire romain (cinquante millions d'habitants environ). Il est surtout présent en Asie mineure et en Afrique du Nord. Né dans les classes populaires, il gagne de plus en plus la faveur des classes supérieures et des élites intellectuelles et urbaines. Fort de la protection impériale, il va prendre son essor et s'imposer en quelques décennies comme la seule religion officielle de l'empire...
Dans un premier temps, Constantin, discret sur ses convictions personnelles, continue de présider aux rituels païens en sa qualité de pontifex maximus (grand pontife). Il ménage aussi le Sénat qui siège à Rome et dont tous les membres sont restés fidèles au paganisme traditionnel. Il se contente d'interdire les sacrifices d'animaux, qu'il a en horreur.
Mais l'Église prend ses aises. Elle devient un élément de stabilité et un point de repère dans un empire brinquebalant.
Tandis que périclitent les institutions administratives, elle affirme sa solidité, fondée sur la légitimité démocratique et une hiérarchie respectée.
Les évêques sont élus par le peuple et désignent eux-mêmes des suppléants parmi les hommes âgés (prêtres) pour guider la communauté.
Lors de la fondation de la « Nouvelle Rome » (Constantinople), l'empereur veille à en exclure toute présence du paganisme. Seul le christianisme y a droit de cité. À Rome même, Constantin engage la construction des basiliques de Saint-Pierre, du Latran et de Saint-Paul-hors-les-murs.
Ainsi la religion chrétienne devient-elle la référence dominante autour de la Méditerranée, au IVe siècle.
Le serait-elle devenue sans la volonté personnelle de l'empereur Constantin ? Sans doute mais de manière plus lente et peut-être plus tourmentée.