Les entendre constamment vilipender le "système" qui, s’il existe, leur a permis d’être là où ils sont et d’en profiter pleinement, c’est tout de même invraisemblable.
C'est devenu une sorte de mantra, de passage obligé de tous les démagogues, et dieu sait s'ils se bousculent en politique ! : De Marine Le Pen à Jean-Luc Mélenchon, de Nicolas Sarkozy à Emmanuel Macron, tous se présentent comme le candidat de l'antisystème, le représentant du peuple contre les élites!
Outre que cela rappelle les mauvais souvenirs des années 30 ou du poujadisme, c'est d'autant plus absurde que ces hérauts de l'antisystème sont eux-mêmes, jusqu'à la caricature, l'incarnation, la quintessence, de ce qu'ils dénoncent : Marine Le Pen comme Donald Trump sont des héritiers fortunés ; Nicolas Sarkozy, ancien ministre et président de la République, se partage entre une villa privée du très chic XVIème arrondissement, le Cap Nègre et les conférences où il gagne en une journée beaucoup plus qu'un smicard en un an ; Emmanuel Macron, du lycée Henri IV à l'ENA, Rothschild et l'Elysée a le parcours parfait de l'élitisme parisien ; Et Jean-Luc Mélenchon, sénateur, ministre, ou député européen est un parfait notable de la République.
Il n'est pas question de leur reprocher quoique ce soit : ils ont du mérite – moins quand ils ont hérité – ils ont réussi et c'est très bien. Mais les entendre constamment vilipender le "système" qui, s'il existe, leur a permis d'être là où ils sont et d'en profiter pleinement, c'est tout de même invraisemblable.
C'est surtout un dangereux abus de langage. Parler du système ne veut rien dire. "Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde" disait Camus. Oui, il y a beaucoup de choses à changer, de réformes à mener notamment en France. Mais tout mélanger et entretenir la confusion, c'est la meilleure façon de ne rien faire.
L'économie de marché crée de la richesse mais ne sait pas la répartir. En France comme ailleurs, la pauvreté progresse et touche 5 à 8,8 millions de personnes (selon la définition adoptée) dont de nombreux enfants. Que fait-on ?
Nos institutions sont à bout de souffle, comme en témoignent les montées de l'abstention, du populisme et du rejet des politiques. Le Président, sorte de monarque républicain s'occupe de tout, mais n'est responsable devant rien, dans un jeu toujours compliqué avec le premier ministre : système bâtard qui n'existe qu'en France. Le parlement vit avec des règles et un rythme qui datent des deux siècles précédents et ne sont plus adaptés au temps présent. Les partis politiques se cantonnent dans des postures et des jeux d'appareils que plus personne ne comprend – ou comprend trop bien – à tel point qu'ils ont dû s'ouvrir à des primaires pour désigner des candidats crédibles.
Les hommes politiques continuent à dire souvent n'importe quoi : pour ne prendre qu'un exemple, jeudi dans le troisième débat de la primaire on a pu entendre que la France était le meilleur élève européen en terme d'émission de gaz à effet de serre, et avait la TVA la plus élevée : 2 fausses informations. Les médias ne sont pas exempts de reproches, tant ils participent parfois à l'hystérisation de l'information et du débat.
Alors changeons tout cela, par des réformes ou de nouvelles pratiques, mais en gardant en tête que, pour reprendre Disraéli, "toute généralité est mensongère, à commencer par celle-ci!"
Source: http://www.huffingtonpost.fr/gerard-leclerc/candidat-antisysteme-presidentielle/?utm_hp_ref=fr-politique