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 Fayard éclipse en catimini un de ses ouvrages sur la Palestine

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Ysaline de Montmirail
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Fayard éclipse en catimini un de ses ouvrages sur la Palestine Empty
MessageSujet: Fayard éclipse en catimini un de ses ouvrages sur la Palestine   Fayard éclipse en catimini un de ses ouvrages sur la Palestine EmptySam 30 Mar - 12:30

Fayard éclipse en catimini un de ses ouvrages sur la Palestine

Récemment, le Que sais-je ? Les Origines du conflit israélo-arabe (1870-1950), s'est retrouvé en tête des ventes dans la catégorie Essais et Documents, révélant la volonté des Français de comprendre les racines de la discorde. Un véritable travail universitaire face à nos bien connus éditorialistes de plateaux télévisés, ou le jour et la nuit...

Le libraire du Point du Jour, installé dans le 5e arrondissement de Paris, Patrick Bobulesco, avait vendu ses derniers exemplaires du titre de l'historien israélien, Ilan Pappé, Le nettoyage ethnique de la Palestine (trad. de l'anglais Paul Chemla), paru chez Fayard en 2008. Il s'est alors rendu sur Dilicom, dans l'optique d'en commander de nouveaux, mais surprise : l'ouvrage était en « arrêt définitif de commercialisation ».

Le site ORB confirme : il est bien à présent épuisé pour cause d'arrêt de commercialisation, et ce depuis ce 7 novembre. Sur Decitre par exemple, le titre n'est plus disponible.

"Un mauvais signal envoyé"

Patrick Bobulesco envoie alors un mail à Isabelle Saporta, directrice de Fayard, afin de demander des explications, craignant une censure. Et de souligner, de son point de vue, l'importance de cette « voix érudite, mais non consensuelle » pour comprendre les enjeux actuels autour du conflit israélo-palestinien.

Auprès d'ActuaLitté, il est formel : « Je suis choqué par la décision de retirer l'ouvrage du catalogue de vente, surtout dans un contexte où le besoin de savoir et d'information est plus crucial que jamais pour comprendre les événements actuels. » Et de développer : « C'est un mauvais signal envoyé, non seulement au grand public, mais aussi dans les milieux éditoriaux et universitaires. Elle suggère une pression croissante pour limiter l'expression de voix discordantes en France, ce qui est préoccupant pour la diversité des perspectives, comme la liberté académique. »

D'après Edistat, qui prend en compte les achats en points de vente, sur les 307 exemplaires vendus cette année, 158 l'ont été entre la semaine 41 (9 au 15 octobre), et la semaine 45 (6 au 12 novembre), soit entre le lendemain de l'attaque du Hamas, le 7 octobre, et son arrêt de commercialisation le 7 novembre. Dans la seule semaine 45, 89 ventes. Si cet ouvrage gêne, c'était le moment de s'en débarrasser...

De l'huile sur le feu

Maxime Lledo, responsable du Service de Presse et Directeur de la communication de Fayard, nous répond : « Concernant ce titre, le contrat était caduque depuis le 27 février 2022. La maison a donc acté, le 3 novembre dernier, sa fin d'exploitation. » Et d'ajouter : « Nous publions par ailleurs, le 28 février prochain une édition réactualisée du Pluriel d'Alain Gresh, Israël-Palestine. »

Certes. Reste qu'il y a un contexte, depuis le 7 octobre dernier, quelque peu inflammable, et qu'entre février 2022 et novembre 2023, 21 mois de différence... Pourquoi à ce moment précis alors ? Une hypothèse : ne pas jeter de l’huile sur le feu, dans un moment déjà assez tendu. Rien que le titre de l'ouvrage, Le nettoyage ethnique de la Palestine, peut constituer un problème pour beaucoup. Le regain d'intérêt pour ce dernier, depuis l'attaque du Hamas et la réplique israélienne, a, semble-t-il, scellé son sort.

Claude Durand le rebelle

Une publication de 2008, dans une autre France et un autre Fayard : celui de Claude Durand, disparu en 2015. Sa politique : publier Serge Klarsfeld et Renaud Camus, dans un esprit de défense de la liberté d'expression, ce qui lui avait valu de nombreuses critiques en son temps. À cela, il avait répondu dans les colonnes du Figaro : « Un des fléaux de la vie intellectuelle de ce pays, c'est que lorsqu'on est à court d'arguments contre quelqu'un et qu'on veut néanmoins l'exécuter, on a tout de suite recours à la bombe atomique : on l'accuse d'être antisémite, raciste, pédophile, quand ce n'est pas les trois à la fois. »

Aujourd'hui, celle qui est à la tête de Hachette, Isabelle Saporta, a également apporté son lot de polémiques, d'une autre nature : suite à sa nomination à la tête de Fayard le 13 juin 2022, plusieurs auteurs ont décidé de quitter le navire. Ils l'accusaient de compromettre l'indépendance de la maison d'édition, affiliée au groupe Hachette, en faveur d'une supposée allégeance à l'ancien président Nicolas Sarkozy.

Une nomination qui intervenait dans le contexte d'une restructuration majeure du paysage éditorial français, marquée par la fusion potentielle des groupes Hachette et Editis, orchestrée par le milliardaire Vincent Bolloré, avec notamment l'aide d'un certain Nicolas Sarkozy. La tension s'est accrue suite à une révélation du Canard enchaîné en mars 2021, indiquant que Fayard aurait secrètement rémunéré Jérôme Lavrilleux, accusateur clé de Sarkozy dans l'affaire Bygmalion, pour sa collaboration sur un livre publié par Fayard.

On l'aura compris : Fayard a bien changé entre 2008 et aujourd'hui. Ce 21 novembre cette fois, Vivendi a finalisé l'acquisition de Hachette Livre, après avoir cédé Editis. De là à faire un lien entre cet arrêt de commercialisation et la patte Bolloré...

Le désastre

Qu'est ce qu'évoque ce livre de recherche historique, signé Ilan Pappé ? Patrick Bobulesco présente : « Il révèle que l'exode des Palestiniens en 1948, ou La Nakba (désastre), était en réalité le fruit d'un plan élaboré bien avant le début des hostilités, et non simplement une conséquence accidentelle de la guerre. Il impliquait notamment la pression, la menace et la destruction de la société urbaine palestinienne. »

D'après les conclusions de l’Israélien, en effet, bien avant le début de la guerre, les dirigeants du mouvement sioniste étaient pleinement conscients que la cohabitation avec la population autochtone serait difficilement conciliable avec leurs ambitions. Selon l'historien, le transfert de la population arabe n'a pas été une circonstance fortuite, mais une composante intrinsèque du projet sioniste dès ses origines.

    À la fin de 1947, la Palestine compte près de 2 millions d'habitants : un tiers de Juifs, deux tiers d'Arabes. La résolution 181 des Nations unies décide sa partition en deux États : l'un doit être presque exclusivement peuplé d'Arabes; dans l'autre, les Juifs seraient légèrement majoritaires. Un an plus tard, c'est un État à très forte majorité juive, Israël, qui occupe 78 % de la Palestine.

    Plus de 500 villages ont été rasés, de nombreuses villes ont presque entièrement perdu leur population arabe. Et 800.000 Arabes palestiniens originaires des territoires qui font désormais partie d'Israël peuplent des camps de réfugiés hors de ses frontières. A en croire l'historiographie israélienne traditionnelle, cette situation serait la résultante imprévisible, involontaire, des aléas d'un conflit armé : la première guerre israélo-arabe. Mais Ilan Pappé en donne ici une explication bien différente.

    À l'aide de documents d'archives, de journaux personnels, de témoignages directs, il reconstitue en détail ce qui s'est vraiment passé à la fin de 1947 et en 1948, ville par ville, village par village. Apparaît alors une entreprise délibérée, systématique, d'expulsion et de destruction: un "nettoyage ethnique" de la Palestine.

    En quelques mois, forts de leur supériorité militaire, de leur accord secret avec le roi de Jordanie, de la passivité complice des soldats britanniques et de l'impéritie de l'ONU, les dirigeants du mouvement sioniste ont organisé le "transfert", par la violence et l'intimidation, d'une population arabe plutôt pacifique, sans défense, abandonnée de tous.

    À la veille du soixantième anniversaire de la création de l'État d'Israël (Ndr : 14 mai 1948), ce livre passionnant vient rappeler que la résolution du problème des réfugiés doit être la pierre angulaire de toute tentative de paix dans la région.

    - Présentation de l'ouvrage par les éditions Fayard.


Un historien controversé

Ilan Pappé est membre de l'école des « nouveaux historiens », reconnue pour sa critique des politiques israéliennes envers les Palestiniens. Elle travaille par ailleurs, depuis les années 1980, à réévaluer de manière critique l'histoire de la création de l'État d'Israël et du conflit israélo-arabe. Elle se distingue enfin par son approche plus sceptique et souvent controversée par rapport aux récits traditionnels promus par l'historiographie israélienne d'après-guerre.

Leurs travaux se concentrent sur la réinterprétation de documents d'archives, y compris ceux déclassifiés par l'État d'Israël, et mettent en lumière des aspects souvent omis ou minimisés du conflit, comme les circonstances entourant la création d'Israël en 1948, le déplacement des populations palestiniennes, et les politiques et stratégies des dirigeants sionistes et israéliens. Parmi les figures les plus éminentes de ce mouvement, on trouve, outre Ilan Pappé, Benny Morris et Avi Shlaim. En France, le journaliste et essayiste français Dominique Vidal fait souvent référence aux travaux des nouveaux historiens israéliens.

Ses travaux, ainsi que de ses positions sur les accusations de massacres et de tueries commises par les forces israéliennes dans le village palestinien de Tantura lors de la guerre israélo-arabe de 1948, ou encore son soutien au boycott des universités israéliennes, ont conduit Ilan Pappé à s'exiler en Grande-Bretagne en 2007, où il et devenu enseignant à Exeter. Son antisionisme et son implication dans le mouvement Boycott Israël (BDS), ont suscité de vives critiques parmi ses pairs. Parmi ses autres œuvres traduites en français figurent La Guerre de 1948 en Palestine et Une terre pour deux peuples.

Au sujet de la suite dans notre hexagone pour l'ouvrage, Le nettoyage ethnique de la Palestine, Ilan Pappé nous a expliqué qu'il cherchait à présent, avec son éditeur de première publication, Oneworld, une nouvelle maison prête à porter son travail de recherche : « On a reçu beaucoup d'intérêt de la part d'éditeurs français et je suis assez certain que nous aurons bientôt un nouvel accord dans ce pays », selon OneWorld.

Représentation et compréhension

Face à l'argument de ne pas ajouter aux tensions, une question se pose : est-ce légitime de retirer un ouvrage précédemment publié pour ce faire, de surcroît porté par un chercheur ?

Patrick Bobulesco constate : « En tant que librairie, j'observe une production éditoriale riche et diversifiée concernant la question palestinienne, avec une multitude d'ouvrages, y compris des témoignages poignants venant de Palestiniens. Elle offre un aperçu précieux et souvent négligé de la situation sur le terrain. Ce qui est frappant, cependant, c'est le contraste marqué entre cette production éditoriale approfondie et le traitement des grands médias de cette question. Ce décalage soulève des interrogations sur la représentation et la compréhension du conflit dans l'espace public. » Le libraire parisien plaide à présent pour la remise en disponibilité de l'ouvrage d'Ilan Pappé.

Problèmes de la recherche ?

Le 15 novembre dernier, plus de 1300 chercheurs et universitaires se sont élevés contre les « intimidations, diffamations et restrictions de la parole scientifique » dans les universités, exacerbées depuis les tragiques événements du 7 octobre. Dans une tribune publiée sur Mediapart, ils ont exprimé leur inquiétude face à un « climat de menace » qui favorise la peur et l'autocensure, nuisant à la libre expression. Ils insistent par ailleurs sur leur « droit à soutenir des causes et à exprimer des solidarités de manière individuelle, à l'instar de tout autre citoyen ».

Quasiment deux mois après l'attaque du Hamas et la réaction israélienne, la situation en France semble toujours aussi crispée : ce 6 décembre, Judith Butler, célèbre pour son Trouble dans le genre (traduit par Cynthia Kraus), était censée donner une conférence intitulée « Contre l’antisémitisme, son instrumentalisation et pour la paix révolutionnaire en Palestine », au Cirque électrique à Paris.

Cet événement a finalement été annulé par la mairie de Paris en raison de préoccupations concernant des « troubles à l'ordre public » et la possibilité de dérapages dans les discours.
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